Une quête de soi effreinée au coeur du Laos
Aucun doute, l’auteur connait le Laos comme sa poche ! Nous, c’était autre chose fait voyager le lecteur aux confins du pays à la poursuite d’un mystérieux manuscrit volé.
Nous, c’était autre chose, voyage éclairant au coeur du Laos
Eric, notaire français bien installé et peu aventureux, décide sur un coup de tête de partir au Laos. Poussé par un chagrin d’amour, il projette de suivre l’itinéraire d’un voyage rêvé et préparé par sa bien aimée. La villégiature se complique lorsqu’il vole un manuscrit bouddiste de première importance dans un temple de Luang Prabang. Le voyage tourne alors à la fuite.
Eric traverse les provinces les plus reculées du Laos : montagnes interdites du Nord, forêts sauvages du centre, impétueux Mékong, et calmes rizières coupe-gorges. On y sent à la fois la force, la beauté et la rudesse de la nature.
Ces péripéties donnent lieu à de belles descriptions des paysages ainsi qu’à quelques expériences non-cartésiennes réservées à ceux qui savent lire la Nature.
“Plus tard, la forêt s’est remise à bruire. (…) A mi-hauteur, les feuillages offrent à qui veut recevoir une palette de verts inespérée, à qui veut entendre le frémissement soyeux des feuilles qui chuchotent entre elles.”
P.390
Ce roman est agréable à lire car l’auteur démontre une bonne connaissance de la vie quotidienne au Laos. Les descriptions de vie calme et réglée en ville où chacun s’affaire avec nonchalance, ou de l’ambiance assommante des fêtes de marchés sont très réalistes !
« Et ce bruit. Un bruit strident et grandiose, moitié tumulte, moitié sirène, à faire trembler les estrades et crisper les mâchoires qui monte en fracas dans le crépuscule. »
P.258
« La placette serait mignonne. Sans le pylône. Des bâtiments coloniaux décrépissent en plein soleil et quelques banians majestueux apportent un peu d’ombre le long de la rive. De grandes persiennes ouvragées dignes de bastides provençales sont tirées à l’intérieur. Un poignée de gens souriants qui trainent leurs sandales les bras ballants vont et viennent. »
P.272
« Le temple est là, sans emphase. J’entre librement dans un jardin simple. Des palmiers nains, deux grands cocotiers, quelques fleurs pastel. J’approche des bâtiments qui semblent s’être endormis à force de regarder le fleuve. Trois ou quatre robes orangées apportent une touche de couleur. »
P.309
Enfin, Pierre-Yves Laborde révèle la face cachée de ce pays : minorités traquées et repoussées dans les montagnes hostiles du Nord, gangrène de la drogue, rivalités politiques au sommet pour garder le pouvoir et la manne financière que représente la gestion de l’Etat… au détriment de la population. Les conflits et tensions sont bien documentés et mis en scène de façon crédible.
Une fuite en quête de soi
Eric pense fuir la France et mettre à distance son chagrin. Pourtant en partant sur les pas de sa bien-aimée, il tente de comprendre l’affection qu’elle porte au Laos. Cela a pour conséquence de l’enfermer dans son chagrin. Cette partie de l’histoire est pesante car le narrateur s’apitoie sur son sort et geint sans cesse. On est content quand il sort enfin de sa torpeur !
La poursuite de ce manuscrit permet à Eric de se confronter à de nombreuses personnes aux intérêts variés, chacune porteuse de sa propre vérité et d’une part de la sagesse universelle. Peu à peu, le héros réalise qu’il existe des enjeux plus larges que ceux directement liés à sa personne. En ouvrant les yeux sur le monde qui l’entoure, il chemine en direction de sa vérité.
Ce livre est écrit dans un style simple et fluide qui convient parfaitement à cette enquête. Les pages se tournent sans y prêter attention, signe d’une histoire bien menée. Enfin, la quête de sens du héros est développée au fil de son périple de façon plus subtile que dans les livres de développement personnel, ce qui est un grand bienfait !
Si vous lisez régulièrement ce blog, vous avez noté que ce dernier genre est loin d’être mon favori. Mes chroniques consacrées à Laurent Gounelle ou Maud Ankaoua sont d’ailleurs parmi les plus mal notées.
J’ai aimé cette lecture pour la vraisemblance des descriptions et des personnages rencontrés. L’Asie se livre ici dans sa beauté mais aussi dans sa cruauté.
« L’Asie, ça ne prévient pas. Mais quand elle est là, elle te le fait savoir et au besoin, elle te rappelle à l’ordre.
P.13
En souriant. »
Si le « coup du manuscrit » est un peu gros, le reste de l’histoire est absolument crédible et les courses-poursuites haletantes. Je conseille de lire ce roman entrainant pour en découvrir plus sur le Laos contemporain, ses défis et sa beauté.
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Cette chronique a été réalisée dans le cadre d’une service de presse non rémunéré. Je remercie Pierre-Yves Laborde de m’avoir permis de silloner le Laos aux côtés d’Eric. Si cette chronique vous a donné envie de le découvrir, vous pouvez trouver ce roman en cliquant ici.
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