Un périple à vélo hors-norme à la recherche du sens de la vie.
Le Cap Nord Dans l’oeil du cyclo-NE raconte le défi que se lance Joël Xavier de rallier le Cap Nord à vélo depuis la commune de Pavillons-sous-Bois (93). Départ le 1er mai 2013 !
Le récit que Joël Xavier en propose est foisonnant de paysages magnifiques mais surtout des réflexions survenues en pédalant.
« Le ciel couvert et les montagnes se reflètent dans un lac immense et sans remous dont je ne vois pas les extrémités d’Est en Ouest. Comme pour renforcer la magie du lieu une brume peu épaisse mais assez dense flotte sur des parcelles du lac à fleur d’eau ou à quelques mètres au dessus. (…) Un paysage vice-versa à couper le souffle ! »
p.176
Une quête de soi
Joël Xavier entreprend ce voyage à vélo alors que sa compagne attend leur premier enfant. Poussé par le désir de mieux se connaître, de comprendre qui il est et d’où il vient, il part sur les traces de son grand-père norvégien inconnu.
« Je vais partir seul. Mais j’emmène avec moi mon monde intérieur. Tous mes masques, qui je suis, qui je crois être. Peut-être que la route me permettra de laisser quelques loups de carnaval sur le bas côté. »
p.56
Ce départ à vélo marque le début d’un processus d’introspection mais également le début d’une vie guidée par des choix faits en conscience, et de ne pas laisser la vie décider pour soi par des non-choix.
« Suis-je vraiment celui que je crois être ou suis-je seulement à la place qui m’a été assignée ? »
p.365
Pourtant, un des principaux thèmes de ce récit de voyage est le lien filial. Avec une conscience aigüe du fait que l’enfance forge l’adulte en devenir, Joël Xavier se demande à chaque tour de pédale ce qu’il va choisir de transmettre de lui à son enfant. Il s’agit d’abord d’être un modèle à la hauteur des valeurs et espoirs portés par l’auteur comme une solide boussole.
« Mais c’est souvent lui [mon fils] qui me rappelle que l’adulte que je suis devenu doit être à la hauteur de celui qu’il pensait devenir. »
p.286
Ce récit est également magnifique car il regorge d’amour. Amour de son père pour Joël enfant, amour de Joël pour sa compagne, pour son enfant à naître…
« Mais ça n’a pas toujours été comme ça. Enfant, j’étais très proche de Papa, ou plutôt cette proximité était assumée de l’un comme de l’autre. Je voulais toujours être près de lui. Je cherchais la sécurité de ses bras, de ses regards et de ses mots. Seules ses colères m’inquiétaient. (…) Comme beaucoup d’enfants, je voyais mon père comme un géant, presque un dieu. C’était le plus beau, le plus fort et, malgré son mètre soixante, le plus grand. Il pouvait tout ! »
p.15
Ce voyage est émouvant par la mise à nu que cette introspection nécessite. De très beaux passages sur de l’histoire familiale dégagent à la fois la chaleur des liens filiaux mais aussi la douleur des chagrins d’enfance.
Un voyage personnel mais universel
« Ici, chaque kilomètre, chaque tour de roue est une connaissance de soi supplémentaire. Une virée dans son âme. Oui, mieux connaître le Monde, c’est mieux se connaître. »
p.96
Le défi sportif et mental est colossal, d’abord par l’exploit physique qu’il représente. Joël Xavier pédale sur 4,500 km et à travers 6 pays : le nord de la France, la Belgique, la Hollande, l’Allemagne, le Danemark, et enfin la Norvège dans toute sa longueur !
Mais il s’agit également de cohabiter avec soi-même, et de dépasser ses propres limites et de surmonter l’adversité (froid, douleurs lombaires, vitesses du VTT cassées, égarement sur une route de montagne au dénivelé vertigineux, nuits passées dans des toilettes publiques, perte du cordon permettant de recharger le téléphone portable, solitude, découragement…)
Les thèmes abordés durant ce voyage sont nombreux et profonds :identité, religion, héritage familial, ethnocentrisme, transmission, patriotisme, condition de l’Homme dans la société moderne…
« Dans le patriotisme norvégien, je n’ai pas perçu d’exclusion. Pourtant, ici, les drapeaux sont nombreux et ostentatoires. (…) Mais j’ai surtout vu des personnes attachées à des valeurs universalistes, heureuses de vivre dans un pays où l’économie est au service de l’humain et pas le contraire. »
p.257
Toujours bienveillant envers les autres et envers lui-même, Joël Xavier apporte au fil des kilomètres des réponses très personnelles aux grandes questions de l’existence. Certaines pensées, sur le repli identitaire par exemple, résonnent fort :
« Chez d’autres, sans doute, ce déracinement [exil de la Réunion à Madagascar] a pu provoquer une forme de repli sur soi, un enfermement culturel plus ou moins prononcé. Juste assez pour se rassurer et chasser suffisamment loin l’idée de perdre son identité. Ce qui reviendrait, d’une certaine façon, à perdre son essence, son être… »
p.18
J’ai beaucoup aimé ce récit de voyage très réussi car il mèle l’intime à l’universel.
Joël Xavier fait parfaitement cohabiter les descriptions de paysages sublimes avec les passages plus réflexifs de son voyage intérieur. Cela donne du rythme au récit.
En ouvrant ce livre, on s’engage dans un beau voyage qui parle de la place de l’Homme – dans sa famille, dans la société, dans la nature, dans l’Histoire…- bienveillant, tolérant, ouvert et respectueux et plein d’amour.
Je souhaite remercier chaleureusement les Editions Unayok de m’avoir fait confiance pour cette chronique et de m’avoir permis de découvrir ce superbe voyage !
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Poursuivez l’aventure aux côtés de Joël Xavier en film :
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